Seine-et-Marne. Jenny, victime d'inceste : «  Il ne faut surtout pas se murer dans le silence »

Jenny Duval a été violée par son oncle durant sa minorité, en Seine-et-Marne. Ce dernier vient d'être condamné aux assises. La victime témoigne à visage découvert. Interview.

Jenny Duval, domiciliée en Seine-et-Marne, a été violée par son oncle durant sa minorité
Jenny Duval, domiciliée en Seine-et-Marne, a été violée par son oncle durant sa minorité (©La Rep77 – A.G.B.)
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Jenny Duval, une infirmière de 36 ans domiciliée à Guignes, a été violée par son oncle dès l’âge de ses 13 ans, jusqu’à sa majorité. Pour ces faits, Gilles C. vient d’être condamné à 13 ans de réclusion criminelle (avec un suivi sociojudiciaire de 7 ans) par la cour d’assises de Seine-et-Marne. La victime témoigne à visage découvert dans nos colonnes.

La Rep. Êtes-vous satisfaite du verdict ?

Jenny Duval. Oui, tout à fait, car la cour m’a reconnu comme victime. Mais je n’ai pas compris tout de suite. Après trois jours de procès, et 4 h 30 de délibéré, c’est l’énoncé du verdict qui a été le plus dur. C’était pire que passer à la barre. Je tremblais de la tête aux pieds et je claquais des dents. C’est comme si je ne maîtrisais plus mon corps et mon compagnon a dû me soutenir. C’est mon avocate, une femme très humaine, qui m’a expliqué le sens de cette condamnation ferme.

Après tant d’années de silence, qu’est ce qui vous a poussé à porter plainte ?

J’ai discuté avec une tante proche des anecdotes salaces de mon oncle qui commençaient à importuner pas mal de gens. Elle m’a alors demandé : « Il ne t’a jamais rien fait ? » Avant que je dise tout, il a fallu 48 heures.

On m’a conseillé de porter plainte mais j’ai mis plusieurs jours pour aller à la gendarmerie. Je ressentais beaucoup de culpabilité et de la honte par rapport à toute ma famille, qui m’a finalement très soutenue. Mais au départ, je ne savais pas où j’allais. C’était hasardeux.

L’ex-compagne de votre oncle a aussi été condamnée à la prison pour avoir participé à deux viols à votre encontre. Que vous inspire-t-elle ?

Avant le procès, je lui en voulais beaucoup de ne pas m’avoir protégée. Mais à l’audience, elle a joué franc-jeu et c’est important pour une victime. Aujourd’hui, je n’ai plus la même rage que j’avais contre elle. C’est une pauvre femme. J’en veux beaucoup plus à mon oncle.

Justement, cet oncle a exprimé des regrets devant les jurés. Y croyez-vous ?

Non, c’est un menteur. Il me dégoûte et je le pense irrécupérable. Je ne lui pardonnerai jamais. Son comportement a d’ailleurs été odieux durant le procès. Le premier jour, je l’ai vu le parvis du tribunal et il nous fixait tous. C’était déstabilisant. De plus, il comparaissait libre et n’avait jamais fait le moindre jour de prison jusqu’à l’énoncé de la peine. Cela fait qu’il se sentait intouchable et ne se rendait pas compte de la gravité des faits. Qu’il soit enfin parti derrière les barreaux est très important pour moi.

Comment avez-vous surmonté vos traumatismes ?

Sans la résilience, je ne serais certainement plus là. J’ai commencé à faire des tentatives de suicide dès l’âge de 15 ans, en avalant des plaquettes de médicaments. Puis je me suis automutilée ce qui m’a valu des plâtres au poignet. Mais à 16 ans, j’ai commencé à prendre du poil de la bête en essayant d’esquiver mon oncle. Il a alors commencé à me harceler jusque sur les lieux de mon stage d’infirmière, c’était la misère. Je me suis donc forgée un caractère. Sans cela, je serais morte et enterrée. Aujourd’hui, je suis maman de deux enfants et mon nouveau conjoint à un rôle très important pour moi, car c’est quelqu’un qui me comprend au quotidien.

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Malgré les récentes révélations dans la presse, comme l’affaire Duhamel, pensez-vous que l’inceste soit encore un sujet tabou ?

Beaucoup trop. C’est tabou aussi bien auprès des enfants que des familles. L’inceste, ça existe pourtant plus qu’on ne le croit. Or, on ne doit pas avoir confiance à 100 % envers quelqu’un, il faut garder une certaine méfiance.

Moi, je suis fille unique et j’étais seule à porter ce fardeau. Quand j’ai révélé les faits, ma famille est tombée des nues, et j’ai eu de la chance qu’elle me croie et qu’elle me soutienne. En fait, il n’est jamais trop tard pour parler, même des années après. Il ne faut surtout pas se murer dans le silence et c’est très bien que le délai de prescription ait été augmenté. Il ne devrait d’ailleurs pas y avoir de prescription du tout.

Avant le procès, vous avez témoigné dans Crimes, sur NRJ12. C’était une étape importante pour vous ?

Oui. Au départ, j’ai fait cela pour moi. Mais mes parents ont vu l’émission, qui reprenait des termes crus. Finalement, cela nous a beaucoup aidés pour la préparation du procès. Je continuerai à témoigner. D’ailleurs, je suis en train de terminer un livre qui s’appelle Emprisonnée, libérée. L’écriture permet effectivement de libérer ce qui est enfoui en vous. Je cherche actuellement un éditeur.

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